Voici une nouvelle inspirée de l'univers du célèbre « meetic », agence de rencontres en ligne.
Finalement j'ai trouvé un thème à mon recueil de nouvelles. Je pense faire un truc sur l'amour (c'est original !) et la manière dont il est pratiqué en société. Ca pourrait s'appeler « Transports en commun ». En attendant je vous souhaite une bonne lecture! (lire à partir du Chapitre 1er)
Chapitre 9ème
Ca ne va pas. Quelque chose ne va pas. La tête entre les mains je fixe mon écran et le message qui y est affiché. Je suis modératrice, tradgeek est mon royaume, je me fous qu’il m’ait bloquée, je peux outrepasser toutes les contraintes techniques… tant que Tommy est connecté. Mais Tommy ne se connecte pas. Tommy ne se connecte plus : les heures passent, toujours rien.
Qu’est-ce qui lui prend ? Me serais-je trompée dans mon diagnostique ? Tommy m’aime, il me l’a dit, il a trouvé celle qu’il cherche, il n’a aucune excuse cette fois... La peur peut-être ? Aurait-il peur de s’engager ? Ca ne colle ni avec sa description, ni avec son discours. Je ne peux me résoudre à la théorie du « pervers », je connais Tommy, ça non plus ça ne colle pas.
Les larmes montent et mes collègues commencent à le remarquer. C’est insupportable. Je n’ai plus qu’une chose à faire : en quelques clics j’accède à la fiche de Tommy_142 et à ses informations cachées. J’entre un mot de passe et je trouve son adresse. J’éteins l’ordinateur et je fonce dans les escaliers.
Ma voiture. Tommy n’habite pas loin, j’y serai dans une vingtaine de minutes pour l’empêcher de partir si vraiment cette histoire de départ est vraie, la seule excuse que j’arrive encore à lui trouver.
« M.A.A. - Solutions informatiques »
C’est la bonne adresse, étrange, il s’agit d’une entreprise. Je passe les portes en verre et je m’adresse à l’accueil :
« Je cherche un certain Tommy. Je ne connais pas son nom de famille, c’est peut-être un de vos employés… ? Si vous pouviez vérifier. »
L’hôtesse me regarde avec un drôle d’air qui me renvoie à l’absurdité de ma démarche. Je ne sais rien de Tommy. Je suis amoureuse d’un courant d’air, je suis amoureuse d’une idée. En pleurant, je rentre chez moi, pour me coucher.
Le lendemain, au bureau, une réunion extraordinaire est décidée par le directeur technique. Au début j’ai eu peur que ça concerne mon départ précipité et injustifié de la veille, mais il n’y a pas de raison.
Je suis un peu déphasée, mais je tache de me concentrer et d’ignorer les messes-basses de mes collègues. Le directeur tient à nous mettre en garde contre un nouveau type de « ‘bot » récemment détecté chez nos concurrents. Le « ‘bot » simule des conversations et des correspondances en copiant du texte dans les archives d’internet selon un schéma préétabli de dialogue mais de façon à toujours se renouveler. Les conséquences néfastes de sa présence dans nos programmes ne se font sentir qu’à long terme et c’est là qu’est le danger. Le « ‘bot » n’envoie pas des milliers d’e-mails pour encombrer les messageries, ni d’insultes : il rend les femmes amoureuses et les laisse tomber. Pour le repérer c’est facile : son pseudonyme finit toujours par « 142 ».